Salina, Les trois exils

Laurent Gaudé

Actes Sud

  • Conseillé par
    23 janvier 2021

    Qu'attendez-vous ?

    Bien que la dernière page de Salina soit tournée, sa souffrance, sa rage, sa passion me font encore frissonner. Poser ce roman et le laisser s'en aller sur d'autres eaux est une peine, tant la vie de Salina a été intense, et une satisfaction, car cette vie a été à son zénith.
    L'honnêteté m'appelle à confesser que la couverture, hypnotisante, est la raison pour laquelle j'ai saisi ce livre en premier lieu. Maintenant que j'ai refermé le livre, cette photographie de Kimiko Yoshida me paraît autant faire partie de l'objet littéraire que l'œuvre elle-même.
    Que dire de Salina que son dernier fils, Malaka, n'aura pas déjà raconté ? Salina, la fille née du désert, exilée dans le désert et dont le sable aura bu les larmes et la colère. Salina, abandonnée enfant, violentée et chassée. Salina, qui eut trois enfants, celui de la haine et de la violence, celui de la vengeance et celui de la vie et de l'amour, comme trois étapes à franchir.
    Ce n'est pas un livre très long mais chaque mot est juste, calibré. Je n'arrive pas totalement à situer ce livre. Ce que je sais, c'est qu'il baigne dans une nappe d'un brouillard mythique, voire mystique. Les sentiments de Salina sont décrits avec une chaleur et une force qui transportent celui qui écoute l'histoire. Elle pourrait être un personnage mythologique, femme-déesse de rancœur et conciliation. Sans concession, sans faiblir, sans crainte, Salina est un des personnages forts comme on en rencontre dans les contes et légendes d'un autre temps.
    Le personnage qui traverse l'histoire, parce qu'il la raconte, m'a tout autant plu : Malaka. Ce troisième fils, cette ultime chance de Salina de trouver une raison de survivre aux exils, au désert et au rejet, est celui qui l'accompagne jusqu'à la fin. Malaka est celui qui permet à cette femme brisée de revivre, d'aller au bout de ses forces et de reposer là où peu peuvent reposer.
    En perpétuant son histoire, en la contant à ses auditeurs, et donc à nous, lecteurs, à Salina, Malaka a offert l'éternité.