Hélène-Lecturissime

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Littéralement passionnée par la littérature, je cherche par tous les biais à partager cette passion et à découvrir de nouveaux romans ou auteurs inoubliables...
J'ai créé récemment un blog de lecture spécialisé en littérature étrangère, ce qui me permet de faire de belles rencontres...

25 février 2013

Une plongée psychologique très statique...

Un récit nostalgique très statique, très psychologique, et finalement assez déprimant il faut bien le dire. Ingrid revit son passé, teinté de regrets, son avenir semble tout aussi opaque, et quant à son présent, il n’est pas plus reluisant : elle apprend en effet que son fils s’est rendu complice d’une agression envers un jeune homme. L’écriture minutieuse analyse au plus près ses sentiments, de façon trop détaillée à mon goût, créant une sensation lente, rapidement étouffante qui m’a poussée à abandonner ma lecture…

21 février 2013

Un indispensable du nature writing.

Loin de toute civilisation tonitruante et souvent aliénante, l’auteur a choisi de se retirer dans une cabane au bord d’un lac, avec comme seuls compagnons la faune et la flore environnante. Il choisit alors une petite île chilienne, l'île de Chiloé, et cette expérience lumineuse qui lui permet de retrouver le monde et de l’embrasser dans toute sa plénitude.

« C’était cela : être présent. Immobile. Comme une stèle au jardin des pierres. Laisser faire. Regarder. Ecouter. Avoir intensément désiré cet état. Se sentir décollé du sol, attiré comme une plante vers la clarté. » (p. 22)

« Tant que les impératifs de l’âge de m’obligent pas à battre en retraite, je me tiens là, debout, et prends l’air du soir sous les variations du crépuscule. Dehors, un grillon grince, des mandibules mettent en pièces leurs victimes, des moucherons d’eau volettent au hasard, un bourdonnement s’enfuit vers le néant. » (p. 115)

Occupé à retaper sa cabane, ses seules autres occupations consistent à chercher sa subsistance quotidienne, puis à observer ce qui l’entoure d’un œil neuf et émerveillé. A la fois soumis à ses sensations et à sa raison, cette expérience le pousse à une méditation intérieure florissante.

« Faisons en nous la place au touchant, au léger, au sublime, au cosmique, à tout ce qui palpite et fait monter notre âme au ciel avant l’heure d’enterrer nos convictions, et de nous vautrer dans les habituels reniements de l’âge mûr une fois venue l’heure où le courage s’use, avant d’éprouver un jour cette fatigue de vieux soldats qui n’aspirent qu’au repos. » (p. 126)

« Et pendant que l’homme exige un décorum à sa disposition, qu’il prend le monde comme une invention façonnée par lui, quel qu’en ait été l’architecte, des animaux franchissent les méridiens, engendrent leur descendance, s’éteignent sans qu’on s’inquiète de savoir s’ils ont assez vécu et si leur existence nous a été profitable. » (p. 51)

Quelques écrivains l’accompagnent dans son monde : Giono et ses Vraies richesses, Henry Thoreau, Harry Martinson, Barry Lopez, John Haines, Annie Dillard… Autant de personnalités qui entretiennent un rapport fort à la nature et à la solitude. Néanmoins, il n’est pas sans rencontrer quelques chiliotes en chair et en os et c’est avec encore davantage d’ouverture et de plaisir qu’il partage alors quelques instants à leurs côtés.

Quand il évoque sa vie d’avant, ses réflexions ont un arrière-goût désagréable :

« Comme ceux que je côtoyais, j’étais moi aussi coupable de soumission volontaire. Naïf, j’ignorais que l’exploité se complaît parfois dans les griffes de l’exploitant et que chacun n’a pas envie de terrasser sa servitude et ses ignorances. Écueil de la modération : à force de s’effacer, on finit par disparaître. À cette époque, j’étais incapable de donner une direction à ma radicalité.

Pour retrouver ma propre trajectoire, il me fallait d’urgence déserter cette mauvaise farce, faire le tri et regarder les solutions qui me restaient. Je décidai de ne plus disperser mon énergie dans le néant mais d’aller enfin ma pente naturelle : je voyagerais pour voir le monde et lui voler sa part de chaleur et d’humanité. Oui, c’était dit, j’irais rencontrer la planète, je disparaîtrais sous les cimes, je naviguerais sur le flot sauvage des cours d’eau avant de devenir un homme-machine, marqué et repéré. Je dévorerais l’espace à la poursuite de l’horizon. Comme un navire navigant à l’estime, je fouillerais l’inconnu démesuré. Cela répondait autant à une volonté profonde qu’à la nécessité de me mettre en retrait de mes aversions les plus indicibles. » (p.122-124)

Dans un style digne des plus grands, David Lefevre partage avec son lecteur une existence frugale lumineuse, lui offrant un monde intact et fascinant. Les photographies au mitan du livre sont aussi là pour attester de ce petit miracle de bonheur.

« N’est-il pas condamné à une certaine solitude l’être délicat qui sent le pouvoir du vent entre ses mains, la danse de l’abeille revigorante, le souffle de l’esprit qui habite le sous-bois. Qui croira ce que j’éprouve à écouter le chant d’un oiseau nocturne ou à passer une nuit à marcher sous la pleine lune ? » p.143)

Un récit inoubliable, fort, un indispensable du nature writing.

11 décembre 2012

Un policier à découvrir

L’atmosphère de ce petit village atypique coincé dans sa vallée est au centre des romans de Louise Penny :

"Three Pines était niché dans sa petite vallée. De la fumée sortait des cheminées de pierre. Des érables, des cerisiers et des pommiers bourgeonnaient. Ici et là, des gens travaillaient au jardin, étendaient du linge sur leurs cordes, balayaient les grandes et élégantes galeries. Le nettoyage du printemps." (p. 84)

Les personnages sont un brin déjantés, évoluant dans un univers très particulier : entre cet homme qui entend ce que disent les arbres, des artistes peintres passionnées, des poètesses plus ou moins douées, une femme qui adopte deux canetons et les couve comme une maman cane, le inspecteur-chef Gamache a fort à faire. D’autant plus qu’il se trouve acculé par sa direction, harcelé, poussé à la démission, espionné par son équipe, mais heureusement soutenu par d’autres. Ces bouleversements internes du service de police densifient la trame du roman, mettant en valeur la nature humaine de cet inspecteur-chef au grand cœur, homme moral par excellence, en conflit avec des hommes bien plus retors et noirs que lui.

L’intrigue principale se concentre autour de la mort de la belle Mado, femme aimée, femme enviée, qui serait peut-être morte de peur, lors d’une séance de spiritisme organisée par une sorcière dans un lieu semi-hanté…

S'il est vrai que le rythme est un peu lent, il n'en reste pas moins que ce roman est à découvrir...

Ombre et lumière du mythe américain

Découvertes Gallimard

15,80
16 novembre 2012

Une belle introduction au travail d’Edward Hopper.

S’attachant davantage au peintre qu’à l’homme, Didier Ottinger le confronte avec les autres mouvements artistiques de son siècle, le rapprochant pour mieux l’éloigner.

« Ottinger montre comment loin des images d'énergie, de dynamisme, et d'architecture verticale souvent associées à l'Amérique du XXe siècle, Hopper compose des atmosphères de solitude, de méditation, "de villes figées dans les formes immobiles d'un âge d'or antérieur à la mutation industrielle des Etats-Unis". » (AFP)

Il nous raconte son chemin de l’illustration aux galeries de peinture. En filigrane une peinture de l’homme s’ébauche, tel ce Pierrot triste nostalgique de ces années parisiennes.

« « La vie privée », la possibilité ou la nostalgie de la solitude et du recueillement sont bien les sujets permanents de l’œuvre d’Edward Hopper. Dans un cadre urbain tentaculaire, dans une architecture domestique ouverte aux quatre vents, il ne reste aux « résistants » de ses tableaux que l’espoir ou la consolation de la chaleur solaire, vecteur symbolique de la plénitude des sensations et de la vie de l’esprit. » (p. 95)

Un petit livre écrit pour découvrir un grand peintre...

La trilogie Fifty Shades

1

JC Lattès

18,00
19 octobre 2012

Le porno pour maman de l'année

Il paraît qu’il s’agit là du livre le plus vendu en 2012, ce qui souligne tout de même le désert affectif, érotique et intellectuel de certaines lectrices…

Anastasia est une cruche jeune femme qui n’a jamais connu l’amour le vrai celui qui fait palpiter le cœur et rend tout électrique. Oui Anastasia a 22 ans, oui Anastasia est belle et a priori intelligente parce qu’elle parle de Thomas Hardy, mais Anastasia ne connaît pas encore le grand frisson… Non Anastasia n’est pas crédible un seul instant… Mais voilà qu’un beau jour Anastasia va rencontrer son prince, beau comme un apollon avec ses chemises blanches en lin, riche, connu, influent, tout à fait aussi insipide qu’elle à la hauteur. Mais comme Anastasia est une jeune vierge effarouchée qui rougit toutes les secondes et passe son temps à chercher un élastique dans son sac en se mordillant la lèvre inférieure, elle va douter de son charme – et pourtant les autres passent leur temps à lui répéter combien elle est belle intelligente et désirable…-


Bref l’un et l’autre vont succomber au coup de foudre après de multiples conversations passionnantes :

« Vous êtes à Portland pour affaires ?
Je couine comme si j’avais le doigt coincé dans une porte. Merde ! Du calme Ana !
- Je suis venu visiter le département agroalimentaire de la Washington State University, qui est situé à Vancouver. Je subventionne des recherches sur la rotation des cultures et la science des sols.
Tu vois ? Il n’est pas du tout venu te voir, ricane ma conscience. Je rougis de la stupidité » (p. 35)

Oui parce qu’Anastasia entend des voix, venues soit de sa conscience (qu’elle a fort faible), soit de sa « déesse intérieure », oui Anastasia est un brin schizo…

Jusqu’ici donc, rien de révolutionnaire dans ce roman digne d’un mauvais Harlequin avec ses formules convenues : « Un courant électrique me parcourt. » (p. 51) « Je me disais que j’aimerais passe les doigts dans vos cheveux, ils doivent être tellement doux. » (p. 53) « Je voudrais détourner le regard mais je suis prise au piège, ensorcelée. » (p. 53)

Quand le beau Grey finit par l’embrasser, la scène est tout aussi ridicule attendue :

« Je n’ai jamais été embrassée comme ça. Ma langue caresse timidement la sienne et s’y joint pour une danse lente, érotique, un frotté-collé-serré de sensations. (…) Oh mon Dieu… Il a envie de moi. Christian Grey. Le dieu grec. Il a envie de moi, et j’ai envie de lui, ici, maintenant, dans cet ascenseur. » (p. 93)

Mais me direz-vous : et les scènes sado-maso ? Et je vous reconnais bien là ô lecteur avide de découvertes inédites… Mais patience...

Après le premier baiser, tout se complique car Grey avoue à sa belle qu’il est adepte des pratiques sado-masos et il lui demande donc de signer un contrat si elle accepte de se livrer à lui, d’être sa « soumise » ouh ouh…

Anastasia –pourvue, rappelons-le, d’un cerveau de souris- met beaucoup de temps à accepter si bien que pendant d’interminables pages elle nous abreuve de « qu’est-ce qu’il est beau- je ne peux pas faire ça- mais qu’est-ce qu’il est beau- je ne veux pas avoir mal- il est beau- je ne suis pas comme ça »

Vous vous en doutez Madame La cruche après mouts tergiversations accepte les termes du contrat, en négociant tout de même certains points -essentiels- comme les repas parce que quand même elle n'est pas soumise au point de se faire dicter ce qu’elle doit manger. Faut pas abuser. Et trois heures de sport au lieu de quatre par semaine quand même ! Mais comme elle explose en mille morceaux – comprenez elle jouit - à chaque fois avec son homme d’expérience, l’appel du sexe est plus fort que sa conscience et sa réflexion inexistantes… Et puis il faut dire que leur relation est tellement torride :

« Tu veux du dessert ? pouffe-t-il.
- Oui.
- C’est toi que je veux comme dessert, murmure-t-il d’une voix suggestive.
- Je ne suis pas sûre d’être assez sucrée.
- Anastasia, tu es délicieuse, j’en sais quelque chose. » (p. 243)

« Mais nous restons en ligne comme des adolescents : ni l’un ni l’autre ne veut raccrocher.
- Raccroche, toi, lui dis-je.
Je le sens enfin sourire.
- Non, toi, raccroche.
Je suis sûre qu’il sourit, maintenant.
- Je n’ai pas envie.
- Moi non plus. » (p. 330)

Oui mais bon, c'est pas tout ça mais on nous a promis du sado-maso... Et là, cruelle déception, les scènes en question sont tout aussi édulcorées que le reste. Alors que la chambre des tortures semblait prometteuse regorger de possibilité, Grey se contente de lui attacher les poignets et de lui bander les yeux en la fouettant gentiment. Et la pauvre sainte nitouche Ana se met à pleure sitôt que le petit fouet tout riquiqui l'effleure.

Pour résumer : un style plat, une héroïne féminine cruche au possible, un héros ridicule (il appelle Ana « Bébé », quelle sexytude…), une intrigue harlequinesque, des scènes érotiques tout aussi banales, et un soupçon de sado-masochisme trèèèèès fade. En un mot : nul.